Stars moquées, jugées, voire insultées pour leur arrogance ou leur inutilité, la pandémie de coronavirus fait très mal aux gens, renvoyés à leur banalité de confinés.
Le coronavirus mettrait-il fin au culte du peuple? Ceux qui habituellement alimentent les réseaux sociaux, hantent les magazines dont on se délecte dans les salons de coiffure – désormais interdits pour cause de viralité – et dont chaque message vaut une augmentation de leurs followers, traversent une mauvaise période. Non seulement les nécessités de base de la vie volent la vedette, mais leur influence semble diminuer à mesure que la gravité de la pandémie augmente.
Ennuyeux et infantilisants
Leur apparence, loin de nous divertir, nous agace souvent. De quoi les blâmer? Leur inutilité, leur impudeur et leur banalité. Oui, leur banalité, car avec le confinement et la fermeture de leur activité de rêve, les célébrités font comme tout le monde : elles sont ennuyeuses quand elles racontent leur quotidien et maladroites quand elles cherchent à récolter des fonds ou à le rendre utile en envoyant des messages de santé tout le monde sait.
Ainsi des dizaines de stars ont publié des vidéos d’utilité publique, demandant à leurs millions de « followers » de « rester chez eux ».
& gt; & gt; A regarder, Arnold Schwarzenegger dans son jacuzzi :
Un autre effet du confinement ; les célébrités doivent affronter une compétition qu’elles n’avaient pas imaginée sur leur propre terrain, tous ces anonymes qui, eux aussi confinés, se sont emparés des réseaux sociaux pour exister et qui ont réussi à être plus drôles, plus solidaires, plus pédagogiques, bref plus efficaces que le peuple. Qui se sont souvent contentées de faire la même chose, mais moins bien, manquant à leur mission de nous divertir ou de nous faire rêver.
Loin des réalités
Alors que la pandémie a inversé, au moins momentanément, la hiérarchie des valeurs – une infirmière vaut trois Gwyneth Paltrow et un éboueur deux managers consultants – les célébrités sont critiquées pour leur maladresse, leur manque de sens des réalités, leur arrogance, et parfois leur romantisme du confinement, notamment en France où certaines déclarations d’écrivains confinés dans leur maison de campagne ont provoqué une violente réaction. Même ceux qui ont été touchés par le coronavirus peuvent être agaçants : Patrick Bruel chantant tous les jours dans sa cave à vins millésimés, par exemple.
& gt; & gt; A regarder, le clip « Imagine » de l’actrice Gal Gadot :
Aux États-Unis, la première à avoir été chahutée par les réseaux sociaux a été l’actrice Gal Gadot – qui incarne Wonder Woman dans les films. Le 19 mars, elle a posté une vidéo dans laquelle elle a invité vingt célébrités à interpréter avec elle une reprise de « Imagine » de John Lennon. Dès sa parution, son clip mal cadré déchaîne une avalanche de moqueries et attire la colère de tous ceux qui ne peuvent pas chanter « un monde sans possessions » parce qu’ils n’ont justement rien et le peu qu’ils ont, ils le perdent.
Quelques jours plus tard, c’est Madonna méconnaissable qui, depuis sa baignoire remplie de pétales de roses, vante les mérites d’un virus « grand égalisateur », à la fois « terrible et brillant » qui « nous rend égaux ». La pipe du peuple.
& gt; & gt; En regardant l’étrange message de Madonna depuis sa baignoire :
En France, c’est Yannick Noah qui a provoqué un tollé sur Internet avec sa vidéo parodique dans laquelle il joue le rôle d’un patient atteint du Covid-19 qui, pour se soigner, reçoit une infusion d’alcool. Même ses fans n’ont pas apprécié qu’il se moque des soignants comme ça. Depuis, Noah, qui s’est excusé publiquement, nous explique comment faire des masques avec une paire de chaussettes.
Amour et désamour
Des célébrités suréquipées qui nous incitent à porter des masques que l’on ne trouve pas ; ne pas sortir de chez soi quand on ne peut pas télétravailler ; trouver en soi les valeurs essentielles alors qu’on ne sait pas terminer le mois, tous ces messages passent mal auprès d’une population inquiète, plus friande d’informations que de recommandations infantilisantes.
Seules célébrités discrètes ou modestes, Tom Hanks aux Etats-Unis, lui-même touché par le virus, ou Vanessa Paradis en France qui reste simple et accessible, trouvent grâce.
Citée par Vox, et reprise par France Info, l’anthropologue américaine Amber Wuthrich note que la crise du coronavirus a ainsi amorcé une « transformation sociale extraordinaire », soutenue par la prise de conscience des inégalités et de la relation entre « ceux qui ont tout et ceux qui ont rien que tout faire ».
Adaptation web : Marie-Claude Martin